ROMANS, PROSES
Présentation
Du même auteur
Daniil Charms, Aleksandr Vvedenskij, Konstantin Vaguinov, Leonid Dobytchine… La liste des poètes russes ne faisant pas partie du canon de la littérature soviétique et dont on entendait à peine parler avant 1989 ne cesse de s’allonger. Parmi eux – à présent tous les classiques de la littérature moderne russe –, se trouve également le poète de Leningrad Guennadi Gor (1907-1981). Lorsqu’il se trouve être mentionné dans les ouvrages de référence, il est considéré comme un auteur de « fantastique scientifique ». La Russie littéraire vient seulement de découvrir Gor comme un maître du grotesque à la limite de l’absurde. Le recueil La Vache avec des nouvelles de différentes années est paru en 2000 avec une préface d’A. Bitov ; le court roman qui a donné son titre au recueil, publié en 1930 et jamais imprimé auparavant, décrit – cassant ironiquement les mots d’ordre du parti et les gros titres de la Pravda – les premières années de la collectivisation, tout en rappelant par son ton la prose d’Andreï Platonov ainsi que celle de Charms. Guennadi Gor, ardent admirateur, défenseur, et collectionneur d’art contemporain, a publié en 1933 le recueil de nouvelles Peintures ; en 1938 suivait la collection Grandes Forêts de Sapins dans laquelle se reflète l’expérience de sa région natale, la Taïga sibérienne, à l’est du lac Baïkal. La nouvelle La Vieille Femme anticipe lucidement le déplacement forcé par Staline de la population du Caucase vers la Sibérie entre 1942 et 1944. Dans le récit Mania et dans l’histoire La Bouilloire, il est question de citoyens soviétiques qui disparaissent subitement. Une sélection de ses récits fantastiques est ici présentée pour la première fois dans cette édition. Le procédé du style narratif de Gor est la réduction radicale, avec laquelle il pèse soigneusement les mots employés, au détail caractéristique et à sa répétition provocante. Gor a vécu les dernières apparitions du groupe Obèriou au début des années 30 et il était l’ami de plusieurs de ses membres. Il n’a jamais renié leurs idéaux, leurs représentations et leurs œuvres littéraires mais les a toujours racontés en petit comité aux jeunes auteurs de Saint Pétersbourg (en plus de Bitov. V. Popov, A. Laskin entre autres). À une époque où personne ne parlait de Konstantin Vaginov, Gor a placé La Statue, un poème de Vaginov, en tête de ses voyages utopiques dans le temps et a présenté son auteur comme un « vrai poète » dans son roman. Quant à Guennadi Gor, il est lui aussi un immense poète notamment avec le Blocus, qui se doit d’être redécouvert.